Songe à la douceur
Songe à la douceur
Clémentine Beauvais
Sarbacane, 2016
240 p.
15.50 €
Résumé éditeur
Quand Tatiana rencontre Eugène, elle a 14 ans, il en a 17 ; c'est l'été, et il n'a rien d'autre à faire que de lui parler. Il est sûr de lui, charmant et plein d'ennui, et elle timide, idéaliste et romantique. Inévitablement, elle tombe amoureuse, et lui, semblerait-il, aussi. Alors elle lui écrit une lettre ; il la rejette, pour de mauvaises raisons peut-être. Et puis un drame les sépare pour de bon.
Dix ans plus tard, ils se retrouvent par hasard. Tatiana s'est affirmée, elle est mûre et confiante ; Eugène s'aperçoit, maintenant, qu'il ne peut plus vivre loin d'elle. Mais est-ce qu'elle veut encore de lui ? Songe à la douceur, c'est l'histoire de ces deux histoires d'amour absolu et déphasé - l'un adolescent, l'autre jeune adulte - et de ce que dix ans, à ce moment-là d'une vie, peuvent changer.
Une double histoire d'amour inspirée des deux Eugène Onéguine de Pouchkine et de Tchaïkovski - et donc écrite en vers, pour en garder la poésie.
Mon avis
Par où commencer pour vous parler de cet OVNI littéraire, comme beaucoup le surnomment à juste titre ?
Après le succès des Petites reines, Clémentine Beauvais s'est attaquée à un classique de la littérature russe, Eugène Oneguine, pour en proposer une réécriture moderne et entièrement composée en vers ! Audacieux pour un livre jeunesse ;)
On s'habitue curieusement assez vite à l'écriture en vers, qui surprend beaucoup au départ : même si on aime la poésie ou encore les romans médiévaux (ce qui est mon cas pour les deux), lire une histoire entière sous cette forme déstabilise forcément. Ce choix d'écriture donne un rythme et une intensité très intéressantes à l'histoire et aux sentiments d'Eugène et Tatiana, mais, pour moi, il a aussi fini par créer une distance avec ce que vivent les personnages. La lecture est devenue parfois laborieuse et, omnubilée par l'alternace d'absence / présence de rimes, concentrée sur les rejets, contre-rejets et enjambements, j'en suis arrivée à ne plus suivre le sens de ce que je lisais et à me sentir face à un texte à analyser (déformation professionnelle de la fac de lettres ?)
Concernant l'histoire en elle-même, peut-être justement à cause de ces passages où je me suis trouvée "déconnectée" et aussi parce que j'attendais vraiment beaucoup de ce qu'on m'avait vendu comme "l'une des plus belles histoires d'amour", je n'ai, hélas, pas réussi à être touchée et, j'ai presque honte de l'avouer, ai refermé le livre en pensant "Tout ça pour ça ?" Pourtant, le vécu des deux héros me parlait et j'étais très emballée durant la première partie du livre...
Songe à la douceur est donc une lecture qui m'aura marquée (on ne peut que l'être par l'inventivité et l'écriture de Clémentine Beauvais), que je relirai sans doute plus tard, que je conseillerai autour de moi et à laquelle j'attribue une très bonne note, mais je reste très frustrée que la magie n'ait pas opéré comme je l'aurais voulu.
"Tatiana emmagasine tous ces petits produits d'Eugène dans la grande arrière-boutique de ses rêves dont elle est l'unique cliente et l'unique vendeuse.
"Bonjour madame je souhaiterais s'i vous plaît le grain de beauté d'Eugène qu'il a sur le cou. Oui celui-là oui oui celui-là qui ressemble à un grain de poivre merci c'est pour décorer ma rêverie où je l'embrasse juste ici."
"et je suis sûre que parmi vous,
il y en a qui pensent,
parfois à des amours gâchées
il y a deux, trois ou dix ans.
Ce n’est pas pire après dix ans,
ça n’augmente pas nécessairement avec le temps,
ce n’est pas
un investissement,
le regret."